Les Roms, un peuple européen
Philippe Rekacewicz — juillet 2010

Le choix d’une seule couleur, la teinte ocre, symbolise l’unité d’un peuple dispersé dans une multitude de pays : la nation romani, qui regroupe notamment les Roms, les Manouches (Sintés), et les Gitans (Kalés).
Celle-ci se définit comme une nation « sans territoire compact et sans prétention à un tel territoire » (cinquième congrès de l’Union Rromani Internationale, Prague, juillet 2000). Ses revendications ne portent pas sur l’espace, mais sur le droit et la justice.
Une proposition de statut-cadre, élaborée par le Ranelpi (Réseau rom des activistes sur les questions juridiques et politiques) pour l’Union européenne, définit le peuple rom comme « un élément constitutif de l’Europe, à laquelle il a apporté une contribution humaine, matérielle, artistique, économique, militaire et morale trop souvent négligée ». Elle souhaite « s’inscrire dans une dynamique progressiste, orientée vers l’intégration sociale, l’égalité des droits, le refus de l’exclusion et le respect mutuel de toutes les identités représentées en Europe ».
Voilà un document que M. Nicolas Sarkozy n’a certainement pas pris la peine de lire, de même que certains élus qui reprennent en chœur ses discours ouvertement racistes et « romophobes ».
Comme par exemple M. Dominique Leclerc, sénateur UMP d’Indre-et-Loire. La scène se passe au Sénat, le 31 juillet 2002, au cours des débats sur la loi Sarkozy : « On a parlé des gens du voyage ! C’est le fléau de demain. […] Ils vont nous poser d’énormes problèmes […]. Ce sont des gens asociaux, aprivatifs (sic), qui n’ont aucune référence et pour lesquels les mots que nous employons n’ont pas de signification. […] Nous, les maires, qui faisons des patrouilles, nous voyons toutes les nuits trois, quatre ou cinq camionnettes de gens du voyage qui viennent “sauter” – je n’ai pas d’autre mot – des gamines de 12 ou 13 ans jusque devant chez leurs parents, et cela n’intéresse personne ! » On peut lire dans le compte rendu officiel, en conclusion de cette élégante envolée : « Bravo et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE [Rassemblement démocratique et social européen] » (cité par Caroline Damiens dans « Sarkozy, les médias et l’invention de la “mafia roumaine” », Les mots sont importants, avril 2005).
Depuis 2002, le gouvernement français tente de criminaliser les Roms de France pour pouvoir mieux les expulser. Alors que, pour les citoyens européens « reconnus », les frontières disparaissent, pour les Roms, si souvent discriminés, et dont les droits les plus élémentaires sont sans cesse niés, elles restent un authentique cauchemar.
Ce sont, sur la carte, ces vilaines balafres rouges et noires.
Cinq événements dans la vie des Roms en Europe
1. M. Michel Habig, maire UMP d’Ensisheim, fait brûler quatorze caravanes d’un campement rom (janvier 2006).
2. Révolte des Roms de Slovaquie contre la faim et la précarité (février 2004).
3. La ville d’Ustinad Laben, en Tchéquie, fait construire un mur pour séparer les Tziganes du reste de la population (octobre 1999).
4. M. Nicolas Sarkozy lance sa campagne anti-Roms (été 2002).
5. M. Nicolas Sarkozy fait expulser, le jour de la Fête de la musique, le musicien Matei Covaci, accordéoniste et père de deux enfants régulièrement scolarisés (juin 2006).
Compléments
STATUT-CADRE
DU PEUPLE RROM
EN UNION EUROPEENNE
Document rédigé par le Réseau rrom
des activistes sur les questions juridiques et politiques (RANELPI)
Année 2000, revu en 2008
des activistes sur les questions juridiques et politiques (RANELPI)
Année 2000, revu en 2008
Bien qu’initialement prévu pour être adressé à l’Union européenne, le présent document est un guide précieux pour toutes les autorités nationales et internationales en Europe et il tombe à nouveau à point nommé. En effet, nous sommes en un moment crucial dans les développements européens. Les organisations intergouvernementales européennes (UE, CoE et OSCE) ont pris conscience que les questions rroms doivent être prises en considération sérieusement et traitées d’une manière efficace.
Dans ce contexte, le projet d’un Statut-cadre du peuple rrom en UE, rédigé il y a huit ans par un réseau d’activistes rroms et non-rroms et ayant reçu l’aval de spécialistes du droit international, vient comme une contribution interne. Sa plus grande caractéristique est la considération du peuple rrom comme un segment des réalités européennes et des Rroms comme des citoyens actifs et acteurs de ces réalités.
Il est vrai que la plupart des considérations exprimées dans ce Statut-cadre sont déjà mises en place en pratique dans plusieurs pays européens. Cependant, le but du présent document est de doter ces pratiques d’une forme juridique afin de faciliter les relations et les discussions entre partenaires, de réduire le risque de régression à des pratiques antérieures, moins propices aux Rroms et à promouvoir une harmonisation raisonnable des pratiques politiques ciblant les Rroms dans le domaine de l’Union européenne.
Dans ce contexte, le projet d’un Statut-cadre du peuple rrom en UE, rédigé il y a huit ans par un réseau d’activistes rroms et non-rroms et ayant reçu l’aval de spécialistes du droit international, vient comme une contribution interne. Sa plus grande caractéristique est la considération du peuple rrom comme un segment des réalités européennes et des Rroms comme des citoyens actifs et acteurs de ces réalités.
Il est vrai que la plupart des considérations exprimées dans ce Statut-cadre sont déjà mises en place en pratique dans plusieurs pays européens. Cependant, le but du présent document est de doter ces pratiques d’une forme juridique afin de faciliter les relations et les discussions entre partenaires, de réduire le risque de régression à des pratiques antérieures, moins propices aux Rroms et à promouvoir une harmonisation raisonnable des pratiques politiques ciblant les Rroms dans le domaine de l’Union européenne.
Sommaire
PREAMBULE
PREMIERE PARTIE : PRINCIPES GENERAUX
Chapitre 1 — Définitions
§ 1 — Identités nationales en Europe
§ 2 — Citoyens et résidents
§ 3 — Identités nationales et nations-pivots
§ 4 — Harmonie entre les composantes nationales
Chapitre 2 — L'identité nationale rromani
§ 1 — Identités nationales sans territoire compact
§ 2 — Entrée en Union Européenne de nouvelles identités nationales sans territoire compact
§ 3 — Notion de "tsigane/Zigeuner" et "Gypsy"
§ 4 — La "nation rromani", telle qu'elle se définit
§ 5 — La "nation rromani", telle qu'elle ne se définit pas
§ 6 — La "nation rromani" en Union Europénne
§ 7 — Les notions de Rrom, Sinto et Kalo
§ 8 — Solidarités transversales
Chapitre 3 — Notion d'identité composite
§ 1 — Identité individuelle complexe et flexible
§ 2 — Identités nationales complexes et flexibles
§ 3 — La gnossodiversité
§ 4 — Synergies et conflits entre les systèmes culturels
DEUXIEME PARTIE : RESOLUTIONS PARTICULIERES D'ACTION
Chapitre 4 — Citoyenneté
Chapitre 5 — Education et recherche
§ 1 — Education à la connaissance et au respect mutuels
§ 2 — Education spécifique de la jeunesse rromani
§ 3 — Conditions de vie compatible avec la scolarisation
§ 4 — Préparation de cadres didactiques
§ 5 — Recherche
§ 6 – Financement
Chapitre 6 — Mobilité
§ 1 — Droit à la mobilité
§ 2 — Droit au stationnement
§ 3 — Droit à la reconnaissance d'un habitat mobile comme domicile
§ 4 — Droit au stationnement sur des parcelles privées
§ 5 — Droit à l'arrêt de la mobilité
§ 6 — Responsabilité des autorités du respect de ces droits
Chapitre 7 — Demandeurs d'asile, réfugiés et migrants
§ 1 — Mobilité et demande d'asile
§ 2 — Causes et caractère politique de l'exil
§ 3 — Travail en amont
§ 4 — Discernement et objectivité dans la compréhension de la question de l’asile
§ 5 — Valorisation de l'apport professionnel des réfugiés, des demandeurs d'asile et des migrants
§ 6 — Liberté du choix
§ 7 — Cas particuliers (ex-Yougoslavie)
§ 8 — Estimation de la sûreté des pays vis-à-vis des Rroms
§ 9 — Déterritorialisation des crimes racistes (cf. doc. de Louvain, 1998 – Section 3, art. 15)
§ 10 — Aide aux femmes, enfants et infirmes rroms en situation de détresse
§ 11 — Insertion des réfugiés et des migrants
§ 12 — Plan de relance de villages désertés de l'Union Européenne
Chapitre 8 — Politique générale de l'Union Européenne sur les Rroms
§ 1 — Observation de la situation des Rroms
§ 2 — Condition d'accession
§ 3 — Coopération
Chapitre 9 — Vie intellectuelle
§ 1 — Connaissance et documentation
§ 2 — Langue rromani
§ 3 — Racismologie
§ 4 — Financement
§ 5 — Egalité de traitement
Chapitre 10 — Travail, logement, hygiène, santé
§ 1 — Travail et environnement
§ 2 — Logement, hygiène et santé
§ 3 – Financement
Chapitre 11 — Représentativité, participation et autorité
§ 1 — Représentation actuelle
§ 2 — L'Union Rromani Internationale
§ 3 — Evolution de la représentativité
§ 4 — Qualités des représentants ; sectorialisation électorale
§ 5 — Primauté de l'action et de la participation sur la représentation
§ 6 — Droit coutumier
§ 7 — Parité hommes/femmes
Chapitre 12 — Symboles, couleurs etc...
§ 1 — Drapeau
§ 2 — Couleurs symboliques
§ 3 — Hymne
CONCLUSION
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