
VILLAGE PEOPLE Samedi10 juillet 2010
La croix et le Banier
François-Marie Banier est sans doute la figure people la plus fascinante de l’année
Diantre, mais qu’est-ce que je fous là? C’est ce que je me disais jeudi soir, affublé d’un (très) juste-au-corps moulant noir, à faire l’andouille dans un spectacle de camp de vacances. C’est toujours pareil. L’organisatrice m’avait demandé de lui rendre service en me tarabustant et en agitant deux sourcils de berger allemand. Et je n’avais pas pu m’empêcher de battre des cils pour lui dire oui.
Si je vous raconte cet épisode cuisant (je compte sur votre discrétion, merci), c’est pour évoquer la figure people la plus fascinante de l’année: François-Marie Banier.
François-Marie Banier, c’est donc le photographe écrivain et touche-à-tout français à qui Liliane Bettencourt, l’héritière de L’Oréal, a cédé un milliard d’euros. Et qui est accusé d’avoir abusé de la santé mentale de sa bienfaitrice.
Quel destin, entre Zola et Sten dhal. D’abord la face publique. François-Marie Banier, soixante-trois ans, est connu pour ses photos de people plutôt jolies (Adjani, Johnny et Cie) et pour ses clichés d’inconnus. Le plus intéressant n’étant pas son œuvre mais sa vie, qu’il a chantournée en artiste.
Fils d’un immigré hongrois ouvrier chez Citroën, Banier fuit un père autoritaire et une mère vaporeuse pour entamer une carrière de courtisan surdoué et graviter autour (et parfois tout près) d’Aragon, Dalí, Beckett, Mitterrand, Jeunet, Marie-Laure de Noailles et autres Paul Morand. Il est très beau, il est brillant. «J’ai été le jeune homme de beaucoup de monde», dira-t-il plus tard. Il devient le fidèle de plusieurs femmes connues ou/et riches comme Silvana Mangano. Ce qu’il appelle «jouer le fils mort».
L’intérêt du personnage Banier, dans la vaste comédie humaine des people, c’est qu’il est doté d’une qualité rare chez les courtisans: la méchanceté. Des témoins racontent comment Banier était non seulement le fidèle de Liliane Bettencourt, mais comment il la menaçait, la houspillait. La recette de son ascension tient donc dans son talent pour les relations humaines. Y compris son absence totale de soumission face à plus haut que soi, qui l’a fait passer pour quelqu’un de sincère aux yeux de puissants entourés de flatteurs.
On ne dira jamais assez le pouvoir des gens odieux sur ceux qui cherchent à se faire aimer, sur nous autres qui formons le peuple des endettés de la reconnaissance. Dussent-ils s’appeler Bettencourt. Ou dussent-ils accepter de faire l’andouille en justaucorps moulant noir.
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