The New York Times : "La crise met en lumière un nouveau FMI"
par Dsk Actualités, samedi 27 novembre 2010, 14:16

L'acceptation d'un plan de sauvetage par l'Irlande, soutenu par le Fonds monétaire international est le dernier d'une série de faits nouveaux survenus depuis 2007 qui ont propulsé le FMI dans une nouvelle position d'autorité et d'importance.
Le Fonds, qui semblait en sommeil et même totalement hors du coup, est de retour par la grand porte. Rien que cette année, il a proposé son aide à la Colombie, au Salvador, à la Grèce, à la Jamaïque, au Mexique, à la Pologne et à l'Ukraine, entre autres.
L'Irlande vient désormais de se joindre à cette longue liste alors que pendant ce temps, de nombreuses questions se posent sur le Portugal et l'Espagne…
Les plus grosses économies se sont désormais tournées vers le FMI pour surveiller les déséquilibres commerciaux et résoudre les multiples craintes de guerre des devises, menaçant fortement la coopération mondiale.
En Europe - les ravages du continent on conduit à sa création en 1944 - le Fonds est vu comme un réel maître de conférence, devant être écouté sur la nécessité des changements économiques.
Son cafouillage lors de la crise financière asiatique de 1997-98, largement considéré comme un point faible ayant aigri les marchés émergents, même s'il n'a pas été oublié, semble avoir été pardonné.
Alors que le FMI étend son influence, l'institution se transforme en même temps pour refléter le nouvel ordre économique.
"Presque du jour au lendemain le FMI a retrouvé sa légitimité pour certains de ses clients et il a même réussi à trouver de nouveaux clients", déclare David Andrew Singer, professeur de sciences politiques au Massachusetts Institute of Technology. "Le FMI est de retour dans les affaires, sa légitimité est en hausse mais, sa transformation s'explique surtout du fait qu'il a proposé de nouvelles solutions pour régler les problèmes".
Récemment, l'Europe a cédé deux sièges au conseil d'administration du Fonds afin de mieux représenter la Chine et d'autres économies émergentes au sein du processus décisionnel.
Plus que tout, le FMI a réévalué certaines de ses orthodoxies de longue date, comme son aversion pour le contrôle des capitaux et son insistance pour que les banques centrales maintiennent un taux d'inflation très bas.
La face publique du FMI est en train de se redorer.
Dominique Strauss-Kahn, l'économiste et homme politique français dirige le fonds depuis 2007, pourrait être le dernier Directeur général choisi en vertu de la coutume de la Seconde Guerre mondiale qui instaure que seul un européen puisse être à la tête du FMI et que seul un américain puisse gérer son institution sœur, le Banque mondiale.
"Je trouverai inconcevable que le futur Directeur général du FMI provienne de l'Europe de l'Ouest ou de l'Amérique du Nord " déclare Kenneth S. Rogoff, professeur à Harvard et ancien économiste en chef du FMI.
Personnage charismatique, Dominique Strauss-Kahn est vanté comme étant le berger qui a su mener le FMI de retour sous les projecteurs.
Pendant ce temps, sa popularité a tellement augmentée dans son pays d'origine qu'il pourrait même briguer la présidence française en 2012.
Quoi qu'il décide, son successeur est susceptible d'être quelqu'un en provenance d'un pays émergeant. Les noms les plus fréquemment mentionnés sont Mohamed A. El-Erian, véritable référence qui dirige PIMCO, l'une des plus grosses sociétés de gestion de fonds au monde; Montek Singh Ahluwalia, Président adjoint de la Commission de Planification en Inde mais encore Arminio Fraga et Guillermo Ortiz, anciens directeurs des banques centrales du Brésil et le Mexique.
Pour l'instant, M. Strauss-Kahn refuse de discuter de son avenir politique, préférant mettre l'accent sur les difficultés économiques de l'Europe.
Lors d'une conférence de la Banque centrale européenne à Francfort, le 19 novembre, il a déclaré que la croissance stellaire du continent européen dans les décennies d'après-guerre - alimentée par l'adoption de technologies, l'intégration croissante et un système bancaire solide - s'était bloquée au début des années 1980.
Il a cité les obstacles à la croissance : le taux de chômage élevé (et son coût social élevé), la stagnation de la productivité dans le sud de l'Europe et un secteur financier davantage axé sur l'innovation de ses arcanes que sur le soutien aux petites entreprises, fortement créatrices d'emplois.
"Alors que le monde de l'après crise prend forme, l'Europe risque d'être laissée loin derrière. L'Europe doit briser le carcan de sa faible croissance. C'est le seul moyen de sauver son modèle social et de remplir le destin européen commun" a t'il déclaré.
M. Strauss-Kahn a exhorté les européens à envisager un "marché du travail unique", comme le marché commun de l'Union européenne pour les marchandises, et a soulevé la question délicate de la redistribution au sein de l'Europe, aiguillonnant doucement sur l'Allemagne - la centrale d'exportation de l'Union - à stimuler la demande intérieure.
Il a également exhorté les gouvernements nationaux à accorder plus de confiance et de moyen à la recherche et au développement et à la politique budgétaire de l'Union européenne affirmant que "les pays doivent être prêts à céder plus d'autorité au centre".
Pour Raymond James Vreeland, politologue à l'Université de Georgetown, "En donnant ces conseils à Europe, dans un sens, le FMI est de retour à ses vrais racines". Après tout, le premier prêt du Fonds a été fait à la France, en 1947.
Les conseils du Fonds sont, à certains égards, encore plus important que les financements qu'il attribue. Ceux-ci, qui reposent sur les contributions des pays membres, ont augmenté en raison de la crise. L'Union européenne finance la plupart des renflouements pour la Grèce, par exemple, mais se fonde sur le FMI pour suivre l'évolution financière et fiscale et pour tenter de réparer le système bancaire en Irlande.
"Ce n'est pas tellement l'argent du FMI qui est nécessaire, mais le mécanisme du FMI pour pouvoir suivre avec des réformes politiques", déclara M. Vreeland aux Européens.
Bien que le réalignement du pouvoir économique a été douloureux pour les pays riches, il a fourni une aubaine inattendue pour le mandat du FMI.
Pour Robert R. Banc, expert en régulation financière internationale à l'Université de Boston, "À bien des égards, le FMI a été béni avec le changement de pouvoir en cours dans l'économie mondiale".
Le G20 a donné au FMI la tâche difficile d'aider à démêler les plus épineux problèmes menaçant la coordination mondiale de l'économie.
L'instabilité qui a contribué à la crise financière de 2008 a été attribuée en partie à la tendance persistante de pays excédentaires, comme la Chine et l'Allemagne, à épargner et trop exporter, et pour les pays en déficit, comme les États-Unis et la Grande-Bretagne, à emprunter et à dépenser.
Selon l'avis du Fonds, les résultats restent encore "limités" et l'un des plus grands défis auquel il va désormais devoir faire face va être de devoir persuader Pékin et Washington de faire des efforts et participer pour régler efficacement les déséquilibres.
Par SEWELL CHAN
(Cet article est consultable en intégralité et gratuitement sur le site du New York Times : http://www.nytimes.com/2010/11/27/business/27fund.html?adxnnl=1&ref=todayspaper&adxnnlx=1290859248-nkbF5X93ewxOqhnoxmmP%2FA
Version papier : "November 27, 2010 - page B3 of the New York edition")
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